La boucle de chaussure militaire

Voici un sujet très vaste qui intéressera les prospecteurs, puisque la boucle est un objet des plus courant en prospection, et il est bien difficile de dater, classifier et surtout trouver l’usage de chaque exemplaire, qu’il soit civil ou militaire.
Cependant, nous allons essayer de débroussailler ce vaste sujet, mais en nous arrêtant simplement aux boucles militaires…

L’infanterie, jusqu’à une époque récente, devait se déplacer à pied, parfois rapidement, et il est bien évident, que pour effectuer une longue distance, les soldats devaient être chaussé correctement. Il n’est qu’à voir les légions romaines, qui ont parcourues le monde antique, uniquement chaussées de sandales…

Le brodequin dans l’armée française, fait son apparition de façon réglementaire au milieu du XVIIème siècle. C’est une chaussure de cuir, à talon haut, qui comprend de chaque coté une « oreille ». Ces deux oreilles se croisent sur le cou de pied (le dessus du pied), et sont maintenues par un ruban noué. Ce ruban n’est autre que l’ancêtre du lacet. La pièce de cuir partant des orteils et se terminant par la languette, passe sous les oreilles et peux se rabattre sur le ruban : cette pièce s’appelle l’empeigne. La semelle est constituée de plusieurs épaisseurs de cuir comme le talon dont la hauteur évoluera en fonction de la mode civile de l’époque. Il n’y a pas de pied droit, ni de gauche, les deux sont identiques, se qui évite un renouvellement de deux chaussures lorsqu’une seule est perdue !
La boucle fait son apparition au début du XVIIIème siècle, et les rubans disparaissent purement et simplement.

Les oreilles  sont percées de trous et une boucle de métal à double griffe vient y prendre place. Une des griffes se fixe sur une oreille repliée sur elle-même et l’autre se boucle par son ardillon sur l’autre oreille.


La fabrication de ce type de chaussure était donnée à un cordonnier civil et elle évoluera petit a petit, comme le talon de cuir qui sera de bois vers 1690, puis la forme du bout qui s’arrondira après 1730. Peux d’exemplaires authentiques existent de nos jours, cependant un modèle peut-être observé au Musée de l’Armée. La boucle carrée changera aussi de forme avec la mode : elle deviendra plus large tout d’abord, puis le modèle deviendra réglementaire vers 1764 (forme ovale) et sera obligatoirement de cuivre. A partir de 1788, dans chaque régiment d’infanterie sert un maître cordonnier, qui aura rang de caporal. La chaussure comporte désormais un pied gauche et un pied droit.


Le soulier à boucle est désormais la chaussure réglementaire de l’infanterie française à la veille de la révolution. Il est confectionné dans chaque corps sous la direction de ce maître cordonnier, la matière première étant achetée par le régiment. Malgré une fabrication soignée, l’usure en campagne de la chaussure est flagrante, et il n’est pas rare de lire dans les témoignages d’époque que bons nombres d’hommes effectuent les marches en sabots, voir pieds nus !!!

Concernant la boucle, il est intéressant de voir et comparer quelques modèles soit trouvés par des prospecteurs sur différents champs de batailles de la Révolution et de l’Empire, mais également de voir les modèles de boucles utilisés par les groupes de reconstitutions de nos jours.
Pendant le période Impériale, les chaussures ne comportent plus de pied droit et gauche.  En effet, pour éviter une utilisation civile d’effets réservés aux armées, on revient à une fabrication simplifiée, de coupe identique pour les deux pieds. Plusieurs raisons à cela : éviter le détournement mais surtout faciliter le complément de souliers user ou perdus. Chaque homme emporte en campagne un soulier de rechange, un marteau, des clous. Il ne faut pas oublier que l’infanterie de l’Empire ne connaît pas sa droite de sa gauche, les soldats sont avant tout des paysans. Pour faire connaître la gauche de la droite lors de la marche, une seule technique : la paille et le foin ! Dans un pied, l’on met du foin, et dans l’autre, de la paille. Reste à remplacer le commandement « un, deux » par « paille, foin, paille, foin » et la troupe marche au pas !

La boucle disparaîtra progressivement pendant  l’Empire et sera remplacée par le lacet, même si les vieux soldats et les sous-officiers la conserve en tenue de sortie. De plus, le lacet de cuir coûte moins cher que la boucle. La chaussure à lacet se généralisera vers 1812  et sera réglementé dès 1817.

Voici quelques exemples de boucles, refabriquées et utilisées lors de reconstituions :





J'espère que ce petit article vous aura fait découvrir une partie peu connue de l'uniforme militaire, et vous permettra aussi d'identifier les exemplaires que vous avez découvert lors de vos recherches...
Patrice

Sources :
Le costume militaire par Paul Martin
L’infanterie napoléonienne 1791-1815 par Alain Pigeard
Revue du Musée de l’Infanterie N°41
Tradition magazine (n° divers)
Archives personnelles

Très intéressant article. Merci

L'article, très documenté, publié dans le n°41 (2e semestre 2001) du Bulletin de l'association des amis du musée de l'Infanterie est en ligne ici :

http://servir-et-defendre.com/viewtopic.php?f=109&t=505#p2033

Merci pour ce lien

J'"essayerais de mettre des photos des exemplaires de fouilles que nous avons et qui sont exposés à Arcis sur Aube jusqu'à dimanche (Mairie d'Arcis sur aube).

patrice

Boucle a chaussure d'officier, en argent massif. Ces boucles sont authentique et remontées sur une paire de chaussures comme à l'époque.